Quand des applis e-santé prennent trop (?) de raccourcis

publié le 27 janvier 2020

Le concept de télé-consultation et télé-délivrance d’arrêts-maladie, via une appli, fait des vagues en France. Jusqu’à susciter une double action en justice de la part de la Caisse nationale d’assurance maladie et de l’Ordre des Médecins.

En cause, une appli – Arrêtmaladie – calquée sur une solution allemande (au-schein.de, lancée en décembre 2018) qui permet à une personne active de se voir décerner un arrêt-maladie et d’introduire une demande de remboursement, moyennant intervention d’un médecin en télé-consultation. L’idée peut paraître séduisante mais voilà, la procédure qui se met en place en coulisses ne répond pas au dogme habituel et il y aurait à la fois tromperie et dérapage.

Explication.

Via l’appli Arrêtmaladie (www.arretmaladie.fr) permet à un malade de solliciter un télé-diagnostic par un médecin et d’obtenir un arrêt maladie pour de petits soucis de santé (refroidissement, stress, douleurs menstruelles, gastro-entérite…) pouvant impliquer deux ou trois jours d’arrêt de travail. 

Bénéfice annoncé pour les patients et les médecins: désengorger les cabinets et accélérer la procédure.

Les télé-consultations sont effectuées par des médecins français indépendants. Premier souci: leur rémunération: 200 euros de l’heure. Autre souci plus fondamental: la “solution” serait en fait en partie une tromperie. Il ne peut en effet y avoir de remboursement que pour les affiliés à une institution de prévoyance, plus chère par définition que la couverture sociale standard. Pas de remboursement par contre par la sécurité sociale pour la simple et bonne raison que “l’arrêt de trois jours correspond au délai de carence pendant lequel l’assurance-maladie ne paie rien”.

Les auteurs de l’appli auraient donc profité d’une zone grise, voire d’un vide juridique.

Voici ce que déclare la CNAM (Caisse nationale de l’assurance maladie): “Pour le système de santé et pour les employeurs, l’industrialisation des arrêts de trois jours est un piège parfait: la durée est trop courte pour que l’assurance-maladie ait le temps de traiter la feuille de soins et d’envoyer un médecin au domicile du malade. Cela coûterait d’ailleurs beaucoup trop cher d’aller vérifier chaque arrêt.”

Les autorités indiquent également que l’appli inverse la logique de la procédure de déclaration en arrêt-maladie: “C’est l’internaute, le patient, qui quand il arrive sur le site, va définir lui-même sa pathologie, qui va lui-même choisir la durée de son arrêt […] et à la fin, on est rappelé par un médecin.”

La CNAM et le Conseil national de l’Ordre des médecins ont donc, chacun, engagé une action en justice.

L’Ordre des médecins précise par ailleurs qu’il “se place résolument dans une dynamique d’accompagnement des nouvelles voies offertes par l’e-santé. Mais il condamne sans réserve toute velléité d’ubérisation de la médecine.

Garant de la déontologie médicale, il défendra toujours l’idée selon laquelle la télémédecine doit être soumise aux mêmes obligations réglementaires et déontologiques que les autres formes de pratiques médicales, dans un parcours de soin coordonné, au service des patients.”

A lire plus en détails sur le site Slate.fr.